Goulimine, une ville de moyenne importance, rose, posée au milieu de nulle-part, dans un désert de cailloux et de sable, peuplée de Maures (de Mauritanie) qui attendent le passage des voitures européennes pour les acheter. (Au Sénégal, il est interdit d'y vendre des véhicules de plus de 5 ans.) En Mauritanie, tout est permis, drogues, contrebande, clandestins, j'en passe et des meilleures...
Goulimine, c'est le carrefour de toutes les négociations. Dès qu'une plaque française, espagnole, allemande ou polonaise se profile à l'horizon de l'unique route, les rabatteurs à l'affût encadrent votre voiture et vous sautent dessus littéralement. Pas le temps de serrer le frein à main pour descendre, téléphoner et appeler Abdel en renfort. Heureusement, un marocain se pointe et comprenant la situation m'aide à entrer dans le télécentre . Il faut jouer des coudes, envoyer balader, du coup mon vocabulaire arabe revient: "temech, temech" (dégage, fiche le camp)
Dans la maison d'Abdel, j'ai salué sa femme Sarah, enceinte et qui suit le jeûne du Ramadan.
(pauvre Bébé, alors que ce rituel, n'est pas imposable aux femmes "en état "...)
J'étrenne mon petit tapis de sol pour dormir. Merveilleuse nuit ! Comme dit Abdel, je suis devenue Madame Tsé-Tsé !
Eh oui, je dors, j'ai sommeil, je fais la sieste et j'ai encore sommeil. Depuis que j'ai posé le pied sur le sol africain, je suis méconnaissable, ressuscitée, par moment décérébrée, à d'autres extra-lucide.
Il y en a qui se raccrochent aux religions, d'autres aux illusions, quant à moi je me raccroche aux branches et saute de l'une à l'autre comme les singes!
Prendre ce qu'il y a de bon au passage et hop! à la suivante !
Pas d'arrêt, pas d'attache, pas de sentiment... En route ...
En ville, en moins de temps qu'il n'en faut pour l'écrire, un "serrurier" m'a refait la clef inexistante de la serrure-portière côté conducteur. Quelle technique !
Un bon conseil : si vous voulez vendre votre voiture de préférence en bon état et au gasoil, ou faire des réparations, essayez d'abord à Goulimine.
Contactez Abdel, par mon intermédiaire, il vous aidera.
Pour la vente, le processus est simple : si vous faites affaire à Goulimine, vous encaissez vos euros (uniquement), vous roulez jusqu'au grand parking dans le désert, juste avant la frontière avec la Mauritanie. Là, vous laissez votre voiture à un passeur, désigné par votre acheteur. Pour vous, c'est terminé! Votre voiture n'ayant pas passé la frontière mauritanienne, elle n'est pas inscrite sur votre passeport, pas de problème : "makanmouchkil ".
Il ne vous reste plus qu'à trouver un "taxi" ou un touriste pour effectuer les quelques kilomètres restant jusqu'à Nouadhibou.
Sarah
A mon retour, l'année prochaine, je ferai un grand récit de mes nombreuses aventures et expéditions au cours de différents séjours en Mauritanie, entre 1998 et 2003.
Pour l'instant, continuons le parcours de la vente de votre véhicule ! Nous sommes encore en terre sahraoui.
Deuxième solution : si ça n'a pas marché à Goulimine, roulez jusqu'à ce fameux no man's land de l'occasion ou de l'épave où l'on vous attendra ! Vous pouvez encore essayer d'y négocier le prix de vente de votre véhicule.
Mais ATTENTION : "ils" sont très au courant des modèles, des années, des bruits de moteur, de la couleur des fumées d'échappement, n'oubliez pas que ce sont de grands professionnels ! Il y en a même certains qui soulèvent un peu la tirette de la jauge d’huile, font ronfler le moteur et regardent si de la fumée sort par la tirette ! C'est ce qu'on m'a fait, je ne la connaissais pas celle-là ! Fixez-vous un prix minimum raisonnable et restez-y. Rajoutez juste 100 euros pour pouvoir baisser de 100 euros. Si vous faites affaire, acceptez uniquement des euros, ils en ont plein leurs boubous !
Trouvez un transport et rendez-vous à la frontière !!!
Il y a quelques années seulement, c'était la galère, cette frontière de Bir-Gandouz. Maintenant tout se fait dans l'ordre dans des bâtiments dignes de ce nom. Seule la chaleur est la même: 50° à l'ombre pendant deux heures et il n'y avait qu'une dizaine de voitures !
Côté Maroc, un tampon, côté Mauritanie, 10 euros pour un visa de 72 h (en sachant qu'on ne peut le faire prolonger qu'à Nouakchott) et 10 euros pour le permis de circulation, si vous passez avec votre voiture évidemment !
Encore 15 km de piste et voilà Nouadhibou "le puits du chacal affamé".
Je retrouve Ali au Camping "La Baie du Lévrier", escale incontournable de tous les routards, qui m'emmène au bureau où travaille mon ami Lemjed, pour une ONG espagnole " cooperacion CEAR"
C'est finalement ici que je vendrai ma R21 à deux Saharaouis du Front Polisario, je n'aurais pas cédé 1 euro ! Mon voyage se poursuivra sans problèmes jusqu'à Sokone et Limane en taxi-brousse .
Mauritanienne
Le Sénégal
Sénégal, Sénégal, pays de la Téranga, pays d'accueil et de bienvenue... dit-on !
Ce n'est plus vraiment ça ; outre les "toubab-cado" habituels, les "madame Dakar" accrocheurs des antiquaires,(marchands de souvenirs),c'est l'agression verbale, hautaine et presque physique à toutes les gares routières, à tous les arrêts de bus. C'est la foire "d'empoigne":une toubab, celle-là est pour moi, "fodium, fodium" (où vas-tu, où vas-tu ?) Kaolack, par ici et on t'arrache le bras. Tes bagages sont déjà sur le toit avant même d'avoir discuté le prix. Car tout se discute même une tomate, curieusement dès que la peau blanche paraît les prix doublent ou triplent. Cette attitude a le pouvoir de me faire sortir de mes gonds mais il faut jouer le jeu pour se faire respecter. Voilà ce que je ressens de Rosso à Limane et de Sokone à Tambacounda.
- C'est le manque d'argent : dans toutes les conversations dans tous les dialectes, un seul mot revient sans cesse : khaliss, khaliss (argent,) Tout est cher, tout est augmenté, tout le monde profite de ce chaos pour grappiller 50 fcfa par-ci, 100 fcfa par-là.
- Ce sont les mauvaises récoltes en prévision (le mil, vers le 15 oct. les arachides vers le 30) dûes au manque de pluie. Celles-ci ont débuté avec un mois de retard (fin juillet au lieu de fin juin) et ont déjà cessé avec 3 semaines d'avance. C'est grave, très grave. La sécheresse gagne du terrain, les agriculteurs sont conscients des changements climatiques. Leurs pères et grands pères récoltaient régulièrement de quoi nourrir leur famille, vendre le surplus et garder des semences pour le prochain hivernage, (saison des pluies)
Maintenant cela ne suffit plus et là-dessus vient se greffer le problème des graines OGM. Comme cela ils ne peuvent plus ressemer avec leur propre récolte et le gouvernement leur fait payer trop cher les semences.
- C'est aussi l'"épidémie" de palu (paludisme) comme si la malaria pouvait être une épidémie !
On continue de les abuser, ils vont à l'hôpital, on leur donne des comprimés totalement inefficaces, du paracétamol et des antibiotiques... Résultat : des ordonnances de 2000 ou 3000 fcfa ( 3 ou 4 euros ) et il n'y a pas de sécurité sociale bien sûr !!! Le seul médicament qui soigne le palu est à base d'artémisine le "PLASMOTRIM". Pris dès le début de la crise, il est très efficace, mais bien sûr trop cher pour la bourse des paysans.
- C'est aussi la décimation des troupeaux. Cette année ce sont les chevaux qui meurent par dizaine, l'an dernier c'étaient les poules, une autre année ce seront les zébus, les vaches ou les ânes. Et pas de vaccinations généralisées. C'est marche ou crève pour les humains comme pour les bêtes.
- C' est surtout la télévision présente dans toutes les concessions (groupement de plusieurs cases d'une même famille sur une même parcelle de terre). Là où l'électricité n'est pas arrivée, il y a des plaques solaires. La télévision est en train d'anéantir la tradition orale et les contes dispensés par les vieux, il n'y a pas si longtemps encore. (Ici "VIEUX" est un terme honorifique)
On dit :
"Un vieillard qui meurt, c'est une bibliothèque qui brûle"
On m'appelle souvent la vieille (à cause de mes cheveux blancs !!!) dans le sens grand'mère et mon avis est demandé et respecté.
Voilà le Sénégal d'aujourd'hui. Heureusement les villages de brousse, loin des villes et de la pollution, du tourisme sexuel et de la prostitution, restent encore, (mais pour combien de temps ?), protégés et authentiques.
Malgré l'islamisation à 70%, l'animisme, le paganisme et la tradition restent très vivaces.
Ajoutez à cela le culte du portable (téléphone portable) et le tableau sera complet !
Passage du bac de Rosso